======Impact LU3ST602======
Porteurs du projet :
* Matthias RUDEANU (contact : [[matthias.rudeanu.1@etu.sorbonne-universite.fr|matthias.rudeanu.1@etu.sorbonne-universite.fr]])
* Benjamin RAYNAUD (contact : [[benjamin.raynaud@etu.sorbonne-universite.fr|benjamin.raynaud@etu.sorbonne-universite.fr]])
====Introduction====
Lorsque l’on veut caractériser un cratère d’impact météoritique, de nombreux critères entrent en considération. Il existe des cratères de diamètre très variable, aux crêtes plus ou moins surélevées, plus ou moins profonds, présentant ou non un pic ou un anneau central, etc. Les paramètres à l’origine de ce polymorphisme sont, de toute évidence, multiples.
\\
Dans notre cas, nous avons choisi de nous interroger sur le rôle d’un paramètre en particulier :
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**//De quelle manière influe la nature du substrat sur la morphologie d’un cratère d’impact ?//**
====Matériel et méthodes====
Afin de modéliser notre astéroïde, nous disposions de l’échantillon de billes de verre et d’acier décrit dans le Tableau 1.
| ^ Diamètre (mm) ^ Masse(g) ^ Volume (m³) ^ masse volumique (kg.m³) ^
^ Verre 1 | 12,21 | 2,4 |9,531E-7 | 2518,1 |
^ Verre 2 | 16,33 | 5,7 |2,280E-06 | 2499,9 |
^ Verre 3 | 24,61 | 19,7 | 7,804E-06 |2524,3 |
^ Verre 4 | 33,55 | 48,7 | 1,977E-05 |2463,3 |
^ Verre 5 | 35,27 | 57,5 | 2,297E-05 | 2503,2 |
^ Acier 1 | 10,0 | 4,0 |5,236E-07 | 7639,4 |
^ Acier 2 | 20,0 | 32,3 |4,189E-06 | 7710,7 |
^ Acier 3 | 30,0 | 110,3 | 1,414E-05 |7800,6 |
Par ailleurs, nous avons réalisé nos lancers depuis les escaliers ouest de la tour 56 et est de la tour 66. Dans les deux cas, le point d’impact était situé au niveau -2. Nous avons donc mesuré, à l’aide d’un télémètre laser, la hauteur de chute de nos billes depuis les différents étages des escaliers :
* Niveau -1 : 4,30m,
* Niveau 0 : 8,60m,
* Niveau 1 : 14,10m,
* Niveau 2 : 17,50m,
* Niveau 3 : 20,90m,
* Niveau 4 : 24,30m,
* Niveau 5 : 27,70m.
D’un point de vue pratique, nous avons pu observer qu’il était important de choisir un réceptacle de taille suffisante, afin de s’assurer que la bille ne tombe pas à côté. Pour des lancers depuis le niveau 1, nous avons utilisé un bac d’une cinquantaine de centimètres de diamètre.
Une des premières vérifications empiriques que nous avons faites a été de s’assurer que la résistance à l’air de la bille était ou non négligeable. Pour ce faire, il nous fallait déterminer la vitesse à l’impact de la bille en absence d’atmosphère :
{{ :wiki:projets:equa_chute_libre.png?direct&200 |}}
(m : masse en kg ; v : vitesse en m.s-1 ; g : accélération de la pesanteur =9,81m.s-2 ; h : hauteur en m).
\\
De plus, il nous fallait connaître les paramètres influant sur la résistance à l’air :
\\
{{ :wiki:projets:impact_equa_4.png?nolink&400 |...}}
\\
(R : résistance à l’air en N ; µ : viscosité dynamique de l’air =18,5×10-6m2.s-1 ; d : diamètre de la bille en m ; U : vitesse à l’impact en m.s-1).
\\
À partir de cette formule, nous observons que la résistance à l’air est proportionnelle au diamètre de notre bille et à sa vitesse à l’impact.
\\
Afin de maximiser la valeur de la résistance à l’air, nous avons réalisé plusieurs lancers avec les billes Acier 3 (les billes en acier les plus grandes), depuis le niveau 5, détaillés dans le Tableau 2.
^Lancer ^Hauteur (m) ^Vitesse moyenne (m.s‾¹) ^vitesse moyenne sans atmosphère (m.s‾¹)^
^ 1 | 27,7 | 10,27 | 23,31 |
^ 2 | 27,7 | 10,51 |23,31 |
^ 3 | 27,7 | 10,25 |23,31 |
**Tableau 2. Détail des lancers tests de la résistance à l’air.**
Au vu des résultats du Tableau 2, nous observons que la différence de vitesse moyenne de chute des billes entre la présence et l’absence d’atmosphère est trop importante pour être négligée. Autrement dit, la résistance à l’air est non-négligeable.
\\
Étant donné que le paramètre que nous souhaitons faire varier d’une série de lancers à l’autre est la nature du substrat, nous décidons de choisir une hauteur et un type de bille fixe pour tous nos lancers à suivre. Ce choix a avant tout été dicté par nos disponibilités en matériel. Ne disposant que d’un bac d’une cinquantaine de centimètres de diamètres, nous avons choisi de réaliser nos lancers depuis le niveau 1 (14,10m) afin de limiter le risque de rater la cible. En ce qui concerne les projectiles, nous avons choisi les billes Acier 2, celles-ci étant plus denses que les billes en verre et les billes Acier 3 étant utilisées par l’autre groupe.
Ne disposant que d’un temps limité, nous avons choisi d’expérimenter des substrats significativement différents les uns des autres. Le but étant de poser les bases pour nos lancers chiffrés. Nous avons ainsi réalisé quatre séries de lancers avec différents substrats :
* série 1 : 7,5kg de sable quartz 0,1 à 0,5mm (83,3%) et 1,5kg de farine (16,7%),
* série 2 : 7,5kg de sable quartz 0,1 à 0,5mm (83,3%), 1,5kg de farine (16,7%) et deux briques placées l’une contre l’autre à environ 2cm de la surface du sable,
* série 3 : 10kg de sable quartz 0,1 à 0,5mm (100%),
* série 4 : 10kg de sable quartz 0,1 à 0,5mm (90,9%) et 1kg d’eau du robinet (9,1%).
{{ :wiki:projets:impact_lu3sv602:figure_1_-_serie_1_lancer_5_ralenti_8_fois.mp4 |}}
* **Figure 1.** Impact n°5 de la série 1, ralenti huit fois.
{{ :wiki:projets:impact_lu3sv602:figure_2_-_serie_2_lancer_5_ralenti_8_fois.mp4 |}}
* **Figure 2.** Impact n°5 de la série 2, ralenti huit fois.
{{ :wiki:projets:impact_lu3sv602:figure_3_-_serie_3_lancer_5_ralenti_8_fois.mp4 |}}
* **Figure 3.** Impact n°5 de la série 3, ralenti huit fois.
{{ :wiki:projets:impact_lu3sv602:figure_4_-_serie_4_lancer_1_ralenti_8_fois.mp4 |}}
* **Figure 4.** Impact n°1 de la série 4, ralenti huit fois.
pour visionner les vidéos, //**ouvrir la vidéo dans un nouvel onglet**//
Entre les deux premières séries, on observe une augmentation de la taille des cratères et de la distance parcourue par les éjectas. Dans le cas de la série 2, le but était initialement de simuler une ligne de faille ; nous voulions vérifier s’il était possible de modéliser des cratères polygonaux, comme décrits dans Öhman et al. 2008. Nous n’avons pas réussi à modéliser ces polygones, mais nous avons mis en évidence un autre phénomène : l’onde de choc liée à l’impact s’est réfléchie à la surface des briques, plus denses, amplifiant ainsi l’éjection du sable. Nous pouvons comparer ce phénomène à la superposition de la croûte terrestre sur le manteau, sur la Terre ou la Lune, ou à celle du régolithe sur la surface rocheuse de la Lune par exemple. Le second cas est peut-être plus proche de nos observations, puisqu’il s’agit d’échelles relativement réduites (sur la Lune, on compte une épaisseur moyenne de régolithe de 3 à 8m) et que le régolithe, tout comme notre sable, n’est pas induré.
\\
Entre les séries 1 et 3, nous avons augmenté la masse volumique du substrat. En effet, le substrat 1 a une masse volumique de 1 370kg.m-3 (83,3% de sable à 1 500kg.m-3 et 16,7% de farine à 720kg.m-3) contre 1 500kg.m-3 pour le substrat 2. Entre nos deux séries, la bille a tendance à moins s’enfoncer, voire à rebondir à l’impact. Cette observation nous suggère que les variations de masse volumique jouent un rôle crucial dans la formation des cratères d’impact.
\\
Enfin, entre les séries 3 et 4, nous avons réduit la masse volumique en ajoutant 1kg d’eau à 1 000kg.m-3 (le substrat 4 a une masse volumique de 1 455kg.m-3). Pour les lancers de série 4, on n’observe que la formation de puis verticaux, la bille allant parfois jusqu’à rebondir contre le fond du bac. De toute évidence, la variation de la masse volumique du substrat n’est pas le seul facteur en cause : l’eau augmente considérablement l’énergie de cohésion entre les grains de sable et cette énergie de cohésion est telle qu’il n’y a quasiment aucun éjectas associés aux impacts de la série 4.
\\
Suite à ces quatre premières séries de lancers, nous avons décidé d’en ajouter quatre supplémentaires. Notre objectif est de recueillir des données chiffrées sur des cratères d’impacts ou seule la masse volumique du substrat varie. Ces séries décrivent des substrats intermédiaires à ceux des séries 1 et 3 :
====Résultats====
Il est possible de calculer le diamètre crête à crête d’un cratère d’impact terrestre en utilisant
diverses données, notamment la densité du substrat. Prenons l’exemple d’un cratère terrestre
simple, d’après Marcus et al. 2004, on peut écrire :
{{ :wiki:projets:impact_equa_2.png?nolink&200 |}}
(Dfr : diamètre crête à crête d’un cratère simple (m) ; Dtc : diamètre d’un cratère transitoire (m)).
De plus, on a :
{{ :wiki:projets:impact_equa_3.png?nolink&400 |}}
(ρi : masse volumique du projectile (kg.m-3) ; ρc : masse volumique du substrat (kg.m-3) ; ϕi :
diamètre du projectile (m) ; vi : vitesse du projectile (m.s-1) ; g : accélération de la pesanteur
=9,81m.s-2 ; θ : angle de l’impact =90°).
Nous avons réalisé nos huit séries de lancers, comme décrit dans le Tableau 3.
^ Série | **5** | **6** | **7** | **8** |
^ Vitesse à l’impact (m.s-1) | 16,3 | 16,3 | 7 | 8 |
^ Masse volumique du substrat (kg.m-3) | 1 429 | 1 370 | 1 320 | 1 277 |
^ Diamètre crête à crête observé (mm) | 56 | 62 | 75 | 79 |
^ Diamètre crête à crête prédit (mm) | 214 | 217 | 220 | 222 |
^ Distance maximale parcourue par les éjectas (mm) | 83 | 86 | 90 | 115 |
**Tableau 3**. Détail des quatre dernières séries de lancers.
{{ :wiki:projets:impact_lu3sv602:impact_figure_5.png?nolink&800 |}}
**Figure 5.** Diamètre du cratère en fonction de la masse volumique du substrat.
{{ :wiki:projets:impact_lu3sv602:impact_figure_6.png?nolink&800 |}}
**Figure 6.** Distance maximale parcourue par les éjectas en fonction de la masse volumique du
substrat.
{{ :wiki:projets:impact_figure_7.png?nolink&800 |}}
**Figure 7**. Diamètre du cratère en fonction de la distance maximale parcourue par les éjectas.
\\
Nous décidons de réaliser une régression linéaire de Y (Dfr observé (mm)) en X (masse volumique
du substrat (kg.m-3)) :
{{ :wiki:projets:impact_lu3sv602:impact_equa.png?nolink&400 |}}
====Discussion====
Au vu de la Figure 5, nous observons une relation inverse (potentiellement linéaire) entre la
masse volumique du substrat et la morphologie des cratères d’impacts. Autrement dit, plus la
masse volumique du substrat augmente, moins le diamètre crête à crête du cratère est important.
Cette observation est parfaitement cohérente avec les formules du Dfr énoncées plus tôt. Nous
avons réalisé une régression linéaire d’Y (Dfr observé) en X (masse volumique du substrat), mais
nous ne disposons pas d’assez de données (ici, n=4) pour que celle-ci soit vraiment solide.
Cependant, nous constatons une différence significative entre les Dfr mesurés et prédits des séries
5 à 8 (plus que du simple au double). La raison possible la plus évidente de cette différence est le
changement d’échelle entre les cratères terrestres observés sur le terrain et nos modèles d’échelle
décimétrique. Il nous manque donc vraisemblablement certains paramètres afin de prédire
efficacement nos Dfr, quelle que soit l’échelle.
\\
Par ailleurs, nous notons que la distance maximale parcourue par les éjectas mesurée pour la série
8 est quelque peu extrême. En effet, elle semble plus élevée que ce à quoi on s’attendrait et dénote
des autres mesures dans les Figures 6 et 7. Ainsi, d’après la Figure 6, en mettant de côté cette dernière valeur, on obtient également une relation inverse potentiellement linéaire entre la
distance maximale parcourue par les éjectas et la masse volumique du substrat.
\\
En ce qui concerne la composition de notre substrat, essentiellement siliceux, elle se rapproche
davantage de la croûte terrestre (du moins continentale) que des surfaces lunaires ou martiennes.
Pour rappel, voici les masses volumiques de divers unités et matériaux :
* sable quartz (composant principal du substrat de nos modèles) → 1 500kg.m-3,
* croute continentale terrestre → 2 700kg.m-3,
* basalte (composant principal des mers lunaires) → 3 140kg.m-3,
* écorce martienne → 2 900kg.m-3.
Nos substrats sont donc plus légers que les premières couches lunaires, martiennes ou terrestres,
ces dernières étant celles dont la masse volumique est la plus proche de nos modèles. Toutefois,
il y a moins de différence entre les masses volumiques des écorces terrestres, lunaires et
martiennes (maximum 540kg.m-3) qu’entre celle de l’écorce terrestre et du sable que nous avons
utilisé (1 200kg.m-3). Il serait donc pertinent, à l’avenir, d’utiliser un substrat dont la masse
volumique se rapproche davantage de celles des écorces de nos planètes (ou satellites) telluriques
modèles.
====Conclusion et perspectives====
Ainsi, nous avons pu mettre en évidence une relation inverse entre la masse volumique du substrat
et la morphologie des cratères d’impacts. Une augmentation de cette masse volumique entrainant
une diminution apparemment linéaire (quoique les données soient trop peu nombreuses pour
l’affirmer) du diamètre
\\
Nous avons donc tenté de corréler nos observations à petite échelle aux modèles prédictifs
existants pour les cratères simples terrestres. Malheureusement, ces modèles se sont révélés
incapables de prédire efficacement les dimensions de nos cratères. De toute évidence, la
différence d’échelle pose problème.
\\
Au groupe qui nous succédera, nous avons, avant tout, des suggestions théoriques. En premier
lieu, il serait pertinent de trouver une formule prédisant les dimensions des cratères d’impacts qui
fonctionnent également à échelle réduite. En ce qui concerne le substrat, il serait peut-être
intéressant de le rapprocher de la réalité ; pour cela, la densité du substrat pourrait être amenée à
des valeurs proches de 2,7 (croute continentale terrestre) ; un autre point possible serait de
constituer un substrat composé d’une couche superficielle et d’une couche profonde plus dense
(comme c’est le cas sur Terre, sur la Lune ou sur Mars). Enfin, si nos successeurs souhaitent faire
varier le substrat autrement que par sa masse volumique, ils peuvent s’intéresser à l’énergie de
cohésion du matériau en utilisant, par exemple, du sable humide ; toutefois, cela nécessite de
trouver des formules permettant de quantifier l’énergie de cohésion et de la relier à l’énergie
libérée à l’impact.
\\
Au groupe qui nous succédera, nous avons également des conseils pratiques. La première et
peut-être la plus importante de toutes est de systématiquement vérifier si vos données sont
utilisables juste après les avoir collectées. Nous vous rappelons également de toujours disposer
d’une échelle et de bien s’assurer que cette échelle est située dans le même plan que l’entité que
vous souhaitez mesurer. Par ailleurs, il serait intéressant de réaliser un nombre important de
lancers de la même série, afin de pouvoir écarter les valeurs extrêmes et de tirer des conclusions
solides. Enfin, si vous souhaitez filmer vos impacts et disposer d’images nettes et non-saccadées
une fois vos vidéos ralenties, nous vous conseillons d’utiliser une caméra haute vitesse.
====Remerciements====
Nous tenons à remercier tout particulièrement Loïc Labrousse (directeur adjoint de l’ISTeP,
Sorbonne Université) et Pierre Thery (responsable de la plateforme expérimentale de la licence
Géosciences, Sorbonne Université) pour leur aide théorique et matérielle dans la réalisation de
ce projet.
Nous souhaitons également remercier Clémence Allietta (étudiante à l’École Nationale de
l’Aviation Civile) pour avoir partagé avec nous ses connaissances en physique.
====Bibliographie====
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ÖHMAN, T., AITTOLA, M., KOSTAMA, V.-P., RAITALA, J. et KORTENIEMI, J., 2008.
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https://doi.org/10.1111/j.1945-5100.2008.tb00632.x.
MARCUS, Robert, MELOSH, H. J. et COLLINS, Gareth, 2004. //Web-based Program for Calculating Effects of an Earth Impact//. Lunar and Planetary Science XXXV. March 15-19, 2004. Abstract No 1360.