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Lorsque l’on veut caractériser un cratère d’impact météoritique, de nombreux critères entrent en considération. Il existe des cratères de diamètre très variable, aux crêtes plus ou moins surélevées, plus ou moins profonds, présentant ou non un pic ou un anneau central, etc. Les paramètres à l’origine de ce polymorphisme sont, de toute évidence, multiples.
Dans notre cas, nous avons choisi de nous interroger sur le rôle d’un paramètre en particulier :
De quelle manière influe la nature du substrat sur la morphologie d’un cratère d’impact ?
Afin de modéliser notre astéroïde, nous disposions de l’échantillon de billes de verre et d’acier décrit dans le Tableau 1.
Diamètre (mm) | Masse(g) | Volume (m³) | masse volumique (kg.m³) | |
---|---|---|---|---|
Verre1 | 35,27 | 57,5 | 2,2972856581687E-05 | 2502,95385754668 |
Verre2 | 33,55 | 48,7 | 1,97731652466884E-05 | 2462,93395075714 |
Verre3 | 24,61 | 19,7 | 7,804E-06 | 2524,3 |
Verre4 | 16,33 | 5,7 | 2,280E-06 | 2499,9 |
Verre5 | 12,21 | 2,4 | 9,531E-7 | 2518,1 |
Acier 3 | 30,0 | 110,3 | 1,414E-05 | 7800,6 |
Acier 2 | 20,0 | 32,3 | 4,189E-06 | 7710,7 |
Acier 1 | 10,0 | 4,0 | 5,236E-07 | 7639,4 |
Par ailleurs, nous avons réalisé nos lancers depuis les escaliers ouest de la tour 56 et est de la tour 66. Dans les deux cas, le point d’impact était situé au niveau -2. Nous avons donc mesuré, à l’aide d’un télémètre laser, la hauteur de chute de nos billes depuis les différents étages des escaliers :
D’un point de vue pratique, nous avons pu observer qu’il était important de choisir un réceptacle de taille suffisante, afin de s’assurer que la bille ne tombe pas à côté. Pour des lancers depuis le niveau 1, nous avons utilisé un bac d’une cinquantaine de centimètres de diamètre.
Une des premières vérifications empiriques que nous avons faites a été de s’assurer que la résistance à l’air de la bille était ou non négligeable. Pour ce faire, il nous fallait déterminer la vitesse à l’impact de la bille en absence d’atmosphère :
(m : masse en kg ; v : vitesse en m.s-1 ; g : accélération de la pesanteur =9,81m.s-2 ; h : hauteur en m).
De plus, il nous fallait connaître les paramètres influant sur la résistance à l’air :
…
(R : résistance à l’air en N ; µ : viscosité dynamique de l’air =18,5×10-6m2.s-1 ; d : diamètre de la bille en m ; U : vitesse à l’impact en m.s-1).
À partir de cette formule, nous observons que la résistance à l’air est proportionnelle au diamètre de notre bille et à sa vitesse à l’impact.
Afin de maximiser la valeur de la résistance à l’air, nous avons réalisé plusieurs lancers avec les billes Acier 3 (les billes en acier les plus grandes), depuis le niveau 5, détaillés dans le Tableau 2.
Lancer | Hauteur (m) | Vitesse moyenne (m.s‾¹) | vitesse moyenne sans atmosphère (m.s‾¹) |
---|---|---|---|
1 | 27,7 | 10,27 | 23,31 |
2 | 27,7 | 10,51 | 23,31 |
3 | 27,7 | 10,25 | 23,31 |
Tableau 2. Détail des lancers tests de la résistance à l’air.
Au vu des résultats du Tableau 2, nous observons que la différence de vitesse moyenne de chute des billes entre la présence et l’absence d’atmosphère est trop importante pour être négligée. Autrement dit, la résistance à l’air est non-négligeable.
Étant donné que le paramètre que nous souhaitons faire varier d’une série de lancers à l’autre est la nature du substrat, nous décidons de choisir une hauteur et un type de bille fixe pour tous nos lancers à suivre. Ce choix a avant tout été dicté par nos disponibilités en matériel. Ne disposant que d’un bac d’une cinquantaine de centimètres de diamètres, nous avons choisi de réaliser nos lancers depuis le niveau 1 (14,10m) afin de limiter le risque de rater la cible. En ce qui concerne les projectiles, nous avons choisi les billes Acier 2, celles-ci étant plus denses que les billes en verre et les billes Acier 3 étant utilisées par l’autre groupe.
Ne disposant que d’un temps limité, nous avons choisi d’expérimenter des substrats significativement différents les uns des autres. Le but étant de poser les bases pour nos lancers chiffrés. Nous avons ainsi réalisé quatre séries de lancers avec différents substrats :
Entre les deux premières séries, on observe une augmentation de la taille des cratères et de la distance parcourue par les éjectas. Dans le cas de la série 2, le but était initialement de simuler une ligne de faille ; nous voulions vérifier s’il était possible de modéliser des cratères polygonaux, comme décrits dans Öhman et al. 2008. Nous n’avons pas réussi à modéliser ces polygones, mais nous avons mis en évidence un autre phénomène : l’onde de choc liée à l’impact s’est réfléchie à la surface des briques, plus denses, amplifiant ainsi l’éjection du sable. Nous pouvons comparer ce phénomène à la superposition de la croûte terrestre sur le manteau, sur la Terre ou la Lune, ou à celle du régolithe sur la surface rocheuse de la Lune par exemple. Le second cas est peut-être plus proche de nos observations, puisqu’il s’agit d’échelles relativement réduites (sur la Lune, on compte une épaisseur moyenne de régolithe de 3 à 8m) et que le régolithe, tout comme notre sable, n’est pas induré.
Entre les séries 1 et 3, nous avons augmenté la masse volumique du substrat. En effet, le substrat 1 a une masse volumique de 1 370kg.m-3 (83,3% de sable à 1 500kg.m-3 et 16,7% de farine à 720kg.m-3) contre 1 500kg.m-3 pour le substrat 2. Entre nos deux séries, la bille a tendance à moins s’enfoncer, voire à rebondir à l’impact. Cette observation nous suggère que les variations de masse volumique jouent un rôle crucial dans la formation des cratères d’impact.
Enfin, entre les séries 3 et 4, nous avons réduit la masse volumique en ajoutant 1kg d’eau à 1 000kg.m-3 (le substrat 4 a une masse volumique de 1 455kg.m-3). Pour les lancers de série 4, on n’observe que la formation de puis verticaux, la bille allant parfois jusqu’à rebondir contre le fond du bac. De toute évidence, la variation de la masse volumique du substrat n’est pas le seul facteur en cause : l’eau augmente considérablement l’énergie de cohésion entre les grains de sable et cette énergie de cohésion est telle qu’il n’y a quasiment aucun éjectas associés aux impacts de la série 4.
Suite à ces quatre premières séries de lancers, nous avons décidé d’en ajouter quatre supplémentaires. Notre objectif est de recueillir des données chiffrées sur des cratères d’impacts ou seule la masse volumique du substrat varie. Ces séries décrivent des substrats intermédiaires à ceux des séries 1 et 3 :
Il est possible de calculer le diamètre crête à crête d’un cratère d’impact terrestre en utilisant diverses données, notamment la densité du substrat. Prenons l’exemple d’un cratère terrestre simple, d’après Marcus et al. 2004, on peut écrire :
(Dfr : diamètre crête à crête d’un cratère simple (m) ; Dtc : diamètre d’un cratère transitoire (m)). De plus, on a :
(ρi : masse volumique du projectile (kg.m-3) ; ρc : masse volumique du substrat (kg.m-3) ; ϕi : diamètre du projectile (m) ; vi : vitesse du projectile (m.s-1) ; g : accélération de la pesanteur =9,81m.s-2 ; θ : angle de l’impact =90°). Nous avons réalisé nos huit séries de lancers, comme décrit dans le Tableau 3.
1 | 5 | 6 |
---|---|---|
1 | 5 | 6 |
Ainsi, nous avons pu mettre en évidence une relation inverse entre la masse volumique du substrat
et la morphologie des cratères d’impacts. Une augmentation de cette masse volumique entrainant
une diminution apparemment linéaire (quoique les données soient trop peu nombreuses pour
l’affirmer) du diamètre
Nous avons donc tenté de corréler nos observations à petite échelle aux modèles prédictifs
existants pour les cratères simples terrestres. Malheureusement, ces modèles se sont révélés
incapables de prédire efficacement les dimensions de nos cratères. De toute évidence, la
différence d’échelle pose problème.
Au groupe qui nous succédera, nous avons, avant tout, des suggestions théoriques. En premier
lieu, il serait pertinent de trouver une formule prédisant les dimensions des cratères d’impacts qui
fonctionnent également à échelle réduite. En ce qui concerne le substrat, il serait peut-être
intéressant de le rapprocher de la réalité ; pour cela, la densité du substrat pourrait être amenée à
des valeurs proches de 2,7 (croute continentale terrestre) ; un autre point possible serait de
constituer un substrat composé d’une couche superficielle et d’une couche profonde plus dense
(comme c’est le cas sur Terre, sur la Lune ou sur Mars). Enfin, si nos successeurs souhaitent faire
varier le substrat autrement que par sa masse volumique, ils peuvent s’intéresser à l’énergie de
cohésion du matériau en utilisant, par exemple, du sable humide ; toutefois, cela nécessite de
trouver des formules permettant de quantifier l’énergie de cohésion et de la relier à l’énergie
libérée à l’impact.
Au groupe qui nous succédera, nous avons également des conseils pratiques. La première et
peut-être la plus importante de toutes – est de systématiquement vérifier si vos données sont
utilisables juste après les avoir collectées. Nous vous rappelons également de toujours disposer
d’une échelle et de bien s’assurer que cette échelle est située dans le même plan que l’entité que
vous souhaitez mesurer. Par ailleurs, il serait intéressant de réaliser un nombre important de
lancers de la même série, afin de pouvoir écarter les valeurs extrêmes et de tirer des conclusions
solides. Enfin, si vous souhaitez filmer vos impacts et disposer d’images nettes et non-saccadées
une fois vos vidéos ralenties, nous vous conseillons d’utiliser une caméra haute vitesse.
MARCUS, Robert, MELOSH, H. J. et COLLINS, Gareth, 2004. Web-based Program for Calculating Effects of an Earth Impact. Lunar and Planetary Science XXXV. March 15-19, 2004. Abstract No 1360.